Exposition de peintures

Le SoiXante AdaDa présente

Fuad Kapidzic

kapidzic

Du 26 mars au 10 avril 2011

du jeudi au dimanche 14h – 18h

Vernissage le samedi 26 mars à 18h

Il semble que Paul Gauguin avec son célèbre : « D’où venons-nous ?, qui sommes-nous ?, où allons-nous ? », s’inquiétait déjà de la direction que prenait le monde. Il avait fui le conformisme des écoles contre lequel il luttait et pensait peindre cette dernière toile avant de se suicider. Ce qu’il ne fit pas, finalement.
Fuad Kapidzic, a fui, lui aussi, mais d’un pays en guerre, la Bosnie, dans la clandestinité, il y a plus de 10 ans.
« Où allons-nous ? » est devenu une question obsédante pour lui depuis.
Allons-nous comprendre que nous devons vivre ensemble ? Que nous ne formons qu’un seul et même peuple ?
Allons-nous rester dans notre bulle de confort et continuer à fermer les yeux ? L’autre à côté de nous, c’est un autre nous-même.

Quand on a vécu la guerre comme Fuad Kapidzic, on devient, malgré soi, expert en déshumanisation. Ses capteurs sont aujourd’hui au rouge. Cette société devient choquante. Les vieux abandonnés, les jeunes rejetés, les femmes toujours inférieures… il se sent concerné. C’est une insulte à l’intelligence humaine.

Gilles Deleuze parlait de « la honte d’être un Homme ». Un terrible sentiment de dégoût parfois.

Quand la question résonne dans tout son corps, Fuad Kapidzic attrape ses pinceaux et des bâtons, les trempe dans la peinture, la fait couler, la contient, humecte, saisit une poignée de sable, la tamise et la jette comme un semeur, prépare un ciment et l’applique en maçon, racle et écrase, plonge à contrecœur sa main dans un seau rempli de colle où macèrent des affiches déchirées glanées dans le métro, malaxe le tout, en extirpe des lambeaux qu’il déchiquète, les lâche sur la toile, replonge un outil dans d’autres mixtures opaques, en extirpe des matières gluantes, les jette, puis les répand avec dégoût, touille la surface, réorganise, triture l’ensemble avec une truelle ou un bâton, enfonce ses doigts dedans et finit du bout des doigts… S’assoit.
« Il faut que je le laisse se sécher. »

Il reste une lumière au bout du tunnel. Pour Fuad Kapidzic, l’art c’est la lumière. Depuis la nuit des temps, l’art éclaire l’humanité. L’art comme témoignage du passage d’une civilisation.
Il faut peindre pour garder les yeux ouverts. Il faut peindre pour rester debout, peindre pour amplifier les cris, et les silences, de ces hommes, ces femmes, ces villes, en qui quelque chose s’est brisé irrémédiablement, et qui parfois n’ont plus la force de résister. Tout juste la force de mettre un pied devant l’autre, sans savoir où ils vont.
« Où allons-nous ? »
« Aujourd’hui, et depuis dix ans, je marche avec des chaussures, deux tailles en dessous de celle de mon pied. »
L’art, c’est tenter de recréer le monde qui va à son pied. Et de lancer des questions.

Marc Guillermin

http://kapidzicfuad.free.fr/

Fuad Kapidzic Fuad Kapidzic

Fuad Kapidzic

Fuad Kapidzic

2 comments on “Exposition de peintures”

  1. Une oeuvre qui, à la lumière de ce beau texte, mérite d’être découverte !

    J’ignore si l’art éclaire autant qu’on le souhaiterait l’humanité, mais il est au moins une luciole dans la nuit… A découvrir à ce propos le très beau livre de Georges Didi-Huberman « Survivance des lucioles » http://www.leseditionsdeminuit.com/f/index.php?sp=liv&livre_id=2627

  2. Geoffroy de Villepin dit :

    Le texte colle à l’œuvre poignante; Fuad kapidzik peint tout simplement pour rester en vie.
    Sa peinture résonne comme un cri d’effroi mais aussi comme un appel à la révolte.

Comments are closed.