En Chantier – L’Ecole Gustave Courbet au SoiXante AdaDa

L’AdaDa a le plaisir d’accueillir

 

L’atelier Expression picturale de l’École d’arts plastiques Gustave Courbet

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Exposition du 26 juin au 6 juillet 2014 du mardi au samedi de 15h à 20h, et le dimanche de 10h à 15h.

Vernissage samedi 28 juin à 18h

En Chantier, Marcel Lubac, enseignant, et Gad Cohen, adhérent, atelier expression plastique, EAP Gustave Courbet

 

Pratiques amateures

On est d’abord dans une école qui favorise les pratiques amateures. Et donc, souvent, se sont des gens qui ont un travail, ce qui veut dire qu’on ne peut mettre en place un certain nombre de choses que dans un temps extrêmement court. Et ça, il faut le clarifier : il s’agit d’une activité qui est choisie, en plus d’un travail, pas d’une application directe au quotidien. C’est ce qui distingue ces pratiques, l’implication et le départ, c’est à dire de ne pas avoir choisi, comme activité principale, la création. Mais c’est un exercice un peu difficile, parce que souvent les gens veulent faire la part des choses. Ils veulent séparer leur activité professionnelle des deux heures qui leur appartiennent, à la fois passer des moments de plaisir dans ces deux heures, mais aussi se réaliser en tant que personne, se découvrir cette fameuse personne qu’ils n’ont pas été jusque là, parce qu’ils ont été pris par rapport à des schémas, des contraintes… Il y a une persistance sociale qui fait que les gens sont embringués, puis c’est toujours extrêmement difficile de bifurquer. Du coup, ces deux heures pour certains, c’est sacré. C’est une victoire, tout en restant un vrai combat pour maintenir cette chose-là. Il faut essayer de jouer avec ces ambivalences et faire qu’on efface définitivement une position d’échec, en tous les cas concevoir ainsi cet exercice de la création. C’est parce que on ne sait pas faire que ça devient une qualité.

Marcel Lubac

Processus

Déjà, je n’arrive pas à dire que c’est un prof. C’est une rencontre, c’est ce qu’il donne pour aller ailleurs… Je ne sais pas s’il y a un processus conscient. Il y a des découvertes au fur et à mesure, qui fructifient ou pas. C’est l’histoire de la pelote, la découverte de quelque chose à développer : il y a un petit bout de la pelote, on se sait pas où ça va, on défait, on défait et ça part.. Tu vois un truc inextricable et puis finalement tu trouves. Et puis tu essaies d’épuiser le truc, de voir où ça te mène. Un autre paramètre, c’est la contrainte de ma vie, professionnelle, affective, etc. J’ai un créneau et je n’ai pas le temps de m’étaler dans la semaine pour faire tout ça. Donc en un temps restreint, il faut que ça sorte. Et ça induit complètement la forme aussi. On n’a pas le temps de se dire qu’on va laisser reposer ça, qu’on va prendre autre chose, non, c’est aussi ça de dire « pas le temps d’attendre ». Mais c’est aussi un atout, parce qu’on est dans une énergie. Je peux travailler aussi très lentement, ou revenir très longtemps sur le même tableau mais là, pour l’instant, c’est cette veine-là, je n’ai pas le temps de m’appesantir, il y a juste à mettre l’essentiel, jusqu’au moment où on ne touche plus et on passe à autre chose parce que, sinon, on va faire dépérir la chose.

Gad Cohen

Rencontres

Le cours, l’atelier, est un plateau d’échanges. C’est vraiment une expérience riche, parce qu’il y a des rencontres, des vies qui s’entrecroisent, etc. C’est comme ça que les gens apprennent à se connaître et à découvrir comment les autres interrogent un certain nombre de choses par le biais de l’expression ; ce qui fait qu’à un moment donné ils ont un langage commun, c’est à dire qu’ils se retrouvent parce qu’ils sont dans une expressivité et essaient de dire autrement des choses qui, souvent, n’ont pas pu être dites ou alors très rarement. Et quand on est justement à l’endroit qui est le mien, où je suis partisan de développer les pratiques amateures, je trouve que favoriser ces pratiques est essentiel, car ça peut devenir des contre pouvoirs. Et d’arriver à ce que ces gens-là, qui ne se croisaient pas, qui ne se connaissaient pas, deviennent un groupe qui échange, qui est dans une générosité, des gens qui sont en même temps et au même moment dans des zones où ils sont spectateurs de ce qu’ils vont faire, leur donner la possibilité de prendre ce temps et d’avoir une observation qui va interroger des états de créativité, ça leur permet assez vite de constituer un ensemble cohérent. Parce qu’ils vont commencer à se comprendre, parce qu’une dialectique se met en place. Je trouve qu’on arrive à une certaine forme de victoire, le fait qu’ils puissent travailler ensemble. Parce que ce n’est pas simple de faire travailler des gens ensemble. Et du coup, là, c’est venu parce qu’ils se sont vraiment compris. Et ça devient de l’acquis. Et à partir de ce moment là, les projets sont beaucoup plus généreux et on arrive à envisager des choses moins privées, plus élargies.

Marcel Lubac

Découvertes

C’est parfois quelque chose qui est de l’ordre de l’enchantement, pour eux, de venir au cours, parce qu’on s’inscrit dans une actualité artistique en leur disant que ça aussi ils y ont droit. En leur montrant aussi qu’il y a nécessité d’avoir un petit accompagnement, ou d’avoir un certain nombre de choses qui leur permettent d’entrer plus facilement dans la création, dans le parcours des uns et des autres. La création peut désarçonner et plutôt que d’être dans la condamnation et dans la censure, ce n’est pas inintéressant d’écouter quelqu’un qui a des informations et qui permet de donner des accès un peu plus ouverts, d’avoir une position un peu plus modérée. Donc tout ça fait partie des outils et du dispositif qu’on essaie de mettre en place dans l’atelier. C’est long, mais nécessaire. Et c’est une posture politique en même temps, parce que là on n’a plus des enfants, des adolescents, là on a des gens qui sont déjà très inscrits socialement. On sent qu’il y a des nécessités à ce que les gens s’inscrivent quelque part, en tous les cas s’impliquent dans des activités, dans une autre découverte des choses. On touche un certain nombre de personnes qui, par leur âge ou leur fonction sociale, offrent des reliefs tout à fait intéressants, parfois même assez uniques dans le cadre d’un enseignement, parce qu’ils marquent des différences et donnent une ouverture sur notre société. C’est un des enjeux de nos cours, à savoir de les intéresser et de les convoquer à participer dans le cadre de l’atelier avec ce qu’ils sont, et ne pas renier d’où ils viennent. Cette qualité de la richesse des uns et des autres, il ne faut surtout pas l’annihiler dans la pratique, bien au contraire.

Marcel Lubac

Exposition

Pour l’école, l’exposition n’est pas forcément un fonctionnement habituel, à part l’exposition de la Légion d’Honneur où toutes les disciplines sont réunies, où tous les ateliers marquent le coup en fin d’année par une exposition collective, collégiale. Là c’est un peu particulier, c’est donner la possibilité à un atelier de montrer ses réalisations. L’initiative vient de la directrice qui avait souhaité à un moment donné que cet atelier puisse avoir un éclairage, montrant des travaux avec une certaine exigence. Car c’est pouvoir montrer aux autres une activité dite amateure mais avec un certain nombre d’éléments qui viendraient surprendre, dérouter parfois, des gens qui se font une image de l’amateur un peu trop étriquée. Des gens qui confisqueraient des choses, parce qu’on est amateurs. Pour nous, c’est important, car ça nous remet aussi en position de voir les productions qui ont été faites dans le cadre de l’atelier, et de les voir ailleurs, de voir comment en situation les choses peuvent tenir aussi. Finalement, on est confrontés nous-mêmes à un exercice prolongé de ce qu’on pourrait avoir de l’atelier : cette mise à distance, pour ceux qui ont participé, permet d’avoir une lecture un peu différente de ce qu’ils ont fait.

Marcel Lubac

24 juin 2014, propos recueillis par Anne Dessertine.

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